27.1.13


HALL
Antoine Espinasseau



Dans les espaces de transition de la ville, le hall tient une place particulière. Urbain par nature - il n’existe que peu de halls à la campagne - il assure le passage d’une importance vers une autre, d’un état à un autre, très souvent entre le public de la rue et le privé du chez soi. Mot emprunté à l’anglais, il est admis en 1930 une prononciation française par le dictionnaire Barbeau Roche, son usage révélant une lacune linguistique et très peu d’équivalents français. L’antichambre évoque une proximité plus rapprochée, la salle d’attente s’exprime dans une temporalité plus longue. Le vestibule serait le terme le plus approprié mais s’apparente à un usage moins contemporain, référant à un type d’espace plus classique et à une connotation plus bourgeoise. 
Le hall connaîtra son âge d’or dans les années 1970, à une époque où la rationalisation des chaines de montages en béton préfabriqué permet de construire beaucoup d’immeubles à moindre coût. Il s’en est reproduit des centaines de milliers, dans les villes petites, moyennes, grandes, les stations de ski, et les périphéries plus hagardes. 
Face à l’uniformisation de cette typologie aux façades répétitives, très souvent posée dans un contexte qu’elle dénie, il a fallu imaginer un rapport au sol nouveau, qui permette de singulariser le bâtiment. Dans ces paysages gris est née une nature propre à ces rez-de-chaussée. Ils ont commencé à faire exister leur personnalité architecturale face au regard du piéton, et ont trouvé dans cette grande vague d’uniformisation, un moyen d’appropriation pour les usagers.De cette abstraction du contexte, ce sont développés des univers artificiels. Le vide des halls s’est peuplé d’ objets extrêmement singuliers, souvent construits dans des matériaux bruts de gros-oeuvre. La brique, le béton, le pavé, le verre, le parement de façade utilisés articulent la transition entre la massivité du volume extérieur vers les pièces intérieures. Dans ces atmosphères tempérées par le chauffage collectif, une nouvelle nature s’est aussi imposée : plantes vertes, palmiers, rocailles. La transition s’est transformée en voyage, toujours plus imaginatif, toujours plus exotique. Elle est devenue une invitation à l’exil, une coupure entre le monde de la rue et l’univers privé par un passage dans une sorte d’irréalité. 
Depuis l’entrée en vigueur du décret n°76-276 du 29 mars 1976 sur l’instauration d’un rapport entre surface hors d’oeuvre nette SHON et la surface hors d’oeuvre brute SHOB,  le hall s’est doucement réduit à un minima, désormais tenu à son strict nécessaire par les promoteurs. Avec des objectifs de coûts de construction les plus faibles, ces mètres carrés non utilisables sont devenus inutiles. Le hall a alors subi deux mouvements antagonistes : une réduction drastique ou un élargissement spectaculaire qui l’a fait muter au stade de lobby, très vaste espace d’apparat représentant le prestige du bâtiment. 
Le hall est donc devenu rare. Pourtant, dans ce moment métropolitain qui ne dure qu’un instant, ce sont créés des mondes, des univers silencieux dans le grondement de la métropole. Prendre le temps de s’arrêter sur ces petits espaces, c’est porter une attention sur une époque, des pratiques et des temps particuliers. Regarder les halls d’immeubles aujourd’ hui, avec tout le caractère désuet que cela peut revêtir, c’est aussi regarder tous ces espaces de la métropole qui semblent oubliés, ces décalages qui se produisent dans le mouvement général, ceux qui ne semblent jamais nous affecter, mais qui revêtissent une certaine forme d’importance car c’est là que s’inventent les libertés et les pratiques exotiques de la ville. Cachés mais visibles aux yeux de tous, réservés à un petit nombre, ce sont ces micro-univers qui génèrent la narration du quotidien.


Texte d'introduction de Flavien Menu 
pour la première exposition personnelle d'Antoine Espinasseau à la Galerie Florence Leoni, du jeudi 31 janvier à 18 heures au 14 mars 2012




5.1.13


FORD GALAXIE
Wim Eckert




In 2009 we again visited Brasilia for an informal study of the architecture of Oscar Niemeyer. After walking through endless lobbies and representational spaces, we decided to take a tour of the memorial to Brazil’s most beloved and probably also most hated president, Doctor Juscelino Kubitschek. He took office on January 31, 1956 after announcing a massive rebuilding program the morning following his election. 
The motto for his political agenda was « fifty years of progress in five» and his administration launched immense public programs including the construction of major highways, hydroelectric facilities, and public buildings. To stimulate industry, tariffs were increased, foreign exchange was revised to aid importation of needed capital, and credit from the Banco Do Brasil and the National Econoic Development Bank became liberally available. 
The country’s productive capacity soared and Brazil became a major industrialized nation. The most impressive program he oversaw, however, was the construction of an entirely new capital, Brasilia, seven hundred miles into the wild interior of the country. Once asked why he built Brasilia, Kubitschek laconically answered that he needed a place to which he could build roads. Brasilia therefore was the prefect alibi to deliver broad infrastructure to the underdeveloped parts of the country and was successfully inaugurated within only four years, just three months before the end of his presidential term.
In addition to this information, heroically displayed by the magnitude of Niemeyer’s architecture, one can also find an original mock-up of Kubitscheck’s office at the memorial. 
This leaves the impression that he left the building and forgot his glasses on the table just a minute ago. The awkward feeling of a strange mixture between a majestic mausoleum and a voyeuritsic peepshow is completed when one finds Kubitschek’s last car, a 1973 Ford Glaxie, sitting in an abandoned parking lot, fully enclosed by glass. It is as if Damien Hirst poured formaldehyde into garage he had mistaken for Snow White’s coffin.
The original advertisment by the Ford Motor Company in 1959 announced the Ford Galaxie as heralding the point in automobile production when nothing remained exclusively for the rich. The car had a strong, modern body which offered a new level of comfort. The upholsteries were so costly that they were matched by few cars at any price level, the interiors were richly paneled, the air was regulated by a silent flow ventilation system, and light permeated through the doors, ashtray, glove box and trunk.
The description of the Ford Galaxie’s interior strangely recalls Edgar Allan Poe’s description of his belowed wife’s coffin in his gothic novel The Fall of the house of Usher. Similar to Poe’s wife, Juscelino Kubitschek seemed alive when we entered the memorial museum. In fact, his ghost is present throughout Brasilia, a city which suffers from apparent death. Everything is exactly fifty years old, a freeze frame the same age as Kubitschek’s car. 
The car does not need to be seen as a symbol for the new capital and its former president. However, on august 22, 1976, Juscelino Kubitscheck died in a car accident near the city of Resende in the state of Rio de janeiro - in a Ford Galaxie. 

See also Miesology here