11.6.10

WK/NY

(William Klein / New York)

"Sur les planches de Brighton Beach, l’ennemi public n°25001, avec sa poule, morte de peur."

En 1954, après six ans de recherches picturales à Paris, notamment dans l’atelier de Fernand Léger, William Klein retourne à New York et s’embarque dans une guerilla compliquée d’amour et de haine avec sa ville natale. Moitié étranger distancié, moitié indigène révolté, il crée un journal photographique décapant. Il explore et catalogue comme ne l’avait fiat aucun photographe avant lui la métropole de l’absurde : foules abruties, défilés débiles, violences normalisée, folle accumulation de débris urbains, murs couverts de messages Dada. Il rejette l’obsession du moment d’objectivité et de non intervention et change le rapport entre photographe et sujet, jongle avec la photographie d’amateur, le reportage et la photo posée. Il emploi du film ultra-rapide, le grand angle, des cadrages et des méthodes de tirages inhabituels, arrive à libérer l’appareil 35mm tout en transformant accident, grain contraste, déformation abstraction, en un nouveau langage visuel.

"Ebbets Fields, Brooklyn. Double header : deux matches de baseball pour le prix d’un, des revers à manger de la tarte, trois hots dogs, une bière, une feuille de score et un éventail de 50 réactions"

" Un métro sans graffiti et sans joie, des usagers soignés mais peu épanoui, et un mendiant aveugle invisible."

"Des dactylos après le spectacle. Comme dans la chanson de Cole Porter : I see the show, then I go home. J’observe que les cigarettes Tareyton pratiquent une meilleure grammaire. Filters as no single filter can. Scansion iambique, en plus. Si Winston et Tareyton fusionnaient, ils pourraient faire rimer leur slogan : tastes good like a cigarettes should, Filters as no single filter could. Et les mains synchronisées. Et la discussion à l’agence de pub pour décider s’il fallait ou non de la cendre au bout de la cigarette, de quelle longueur, quelle consistance, quelle nuance de gris. Et le bonhomme de neige à oreillette et cache nez, qui pousse le coca. Et les dactylos elles mêmes, les gants, la bague, le bracelet, l’air suspicieux, les coiffures. Tout ce qu’il peut y avoir à digérer en deux secondes. "
"No comment"
"Hanburger à 40 cents"
"Staten Island, le midwest par rapport à Manhattan. Un bon petit patelin. Plus tard Twin Peaks ? Mon ombre en train de braquer l’appareil photo. Celle de ma femme, qui ramène ses cheveux en arrière. "

"Devant un café restaurant de Long Island, dont le message s’affiche sur tous les arbres ou presque. Surréalisme suburbain. " "Un martien de 15 mètres de haut pour célébrer le grand magasin Macy’s. Le défilé de la fête de Thanksgiving en ces temps moins gavés de médias représentait peut être le clou de l’année. On faisait le même battage autour des nouveaux chars et ballons de choc que pour la dernière superproduction hollywoodienne. Toute la ville parlait de cet événement des semaines à l’avance, pas question de manquer ça. Je devais avoir dix ans quand une copine anarchiste m’a annoncé qu’elle comptait s’armer de fléchettes pour faire péter les ballons. Terrifié j’y suis allé sans elle, m’attendant sans arrêt à entendre d’affreuses explosions. "

""Coin 40e rue et 2éme Avenue. Tout est là. Les milliards, les sous, la grandeur, la dégradation, l’idéologie et la communication. Centre droit, le Chrysler Building, deuxième plus grand des gratte-ciel, extrême droite, celui du Daily News, des immeubles miteux, le logo des téléphones Ma Bell, le SO d’Esso, une pancarte peint à la main qui offre le parking du week-end au prix d’ami de 75cents et, en bas à droite, une affiche de Radio Free Europe : « Combattez le communisme avec les dollars de la vérité ». A mes yeux, c’était le signe de ponctuation pour ce bric-à-brac de paysage urbain – et une farce. Mais après tout, ce n’était pas si ridicule d’imaginer que Louis Armstrong et Sinatra pouvaient contribuer à faire s’écrouler les murs."

"Le métro aérien, à hauteur des yeux. Des dizaines de kilomètres de voie ferrée urbaine au niveau du premier étage. Imaginez vous ce que c’est de grandir, de vivre, de mourir avec ces trains antiques bringuebalants sous le nez. Au passage, j’essayais de déchiffrer par la fenêtre le film accélèré de la vie dans les logements aux murs verts sous l’ampoule nue. "

Textes&Photos : William Klein, New York 1954/1955, édition Marval

Pour ceux qui souhaiteraient en savoir plus sur le travail de Klein, voici deux liens provenant de l'excellent American Suburb X
ici une vidéo de la série Contacts où ils parlent de son travail
et là une interview de "Mister Freedom"


7.6.10

BM

(Bardi Museu)
"La beauté en elle même n'est pas quelque chose qui existe réellement. Cela existe durant une periode historique, et ensuite les modes changent et cela devient quelque chose de mauvais. Pour le musée de São Paulo j'ai seulement essayer d'assumer certaines positions. Je ne cherchais pas la beauté. Je voulais la liberté. Les intellectuels n'ont jamais aimé ça, mais les gens disaient : vous savez qui a construit ca? C'est une femme!!..."


Museu De Arte de Sao Paulo, Lina Bo Bardi architecte, 1968